Bâtir le musée ensemble : la force de la co-création

ICOM CECA-conferentie

© M Leuven

M accueille une conférence internationale de renom

Bâtir le musée ensemble : la force de la co-création

En octobre aura lieu au M une prestigieuse conférence internationale du secteur muséal. Sa thématique est aussi passionnante qu'actuelle : la co‑création à l'intérieur et à l'extérieur du musée.

ICOM CECA-conferentie

© M Leuven

Le Conseil international des Musées (ICOM) est un réseau mondial dont le M fait partie. L'ICOM se compose de plusieurs comités internationaux, dont le plus grand et le plus ancien est le CECA, le Comité pour l'Éducation et l'Action culturelle, actif dans le domaine de la médiation envers le public. Le CECA organise chaque année une conférence, à chaque fois dans un autre pays. Avec un an de retard pour cause de Covid, la Belgique et M ont l'honneur de l'accueillir en 2021.

 

La thématique de la conférence est donc la co‑création à l'intérieur et à l'extérieur du musée, un mode de travail qui se répand largement ces dernières années. Autrefois beaucoup de musées étaient des tours d'ivoire, où des spécialistes remplissaient les salles et imaginaient des expositions que le public pouvait alors venir voir. La co‑création rejette ce fonctionnement à sens unique ; le principe est que les collaborateurs du musée ne décident plus souverainement de l'agencement des salles ou d'une exposition, mais qu'il y associent d'autres personnes, des collègues d'autres départements, mais aussi – ou surtout – le public.

 

Le modèle du M

Ce n'est pas un hasard si le M organise une conférence sur la co‑création et la participation du public. En effet, nous disposons déjà d'une solide expérience dans ce domaine. Ces dernières années, nous avons par exemple mis sur pied des collaborations étroites avec l'école fondamentale Mater Dei, l'hôpital pour enfants de l'UZ Leuven et la prison auxiliaire de Louvain. Depuis peu, M propose 'Les Dix', une nouvelle présentation de la collection dont les œuvres ont été sélectionnées par dix visiteurs. Auparavant nous avions déjà monté d'autres présentations de la collection en collaboration avec notre public : 'Accueil sans frontières', composée par des personnes issues de l'immigration, et 'Non-sens et folie', dont les commissaires étaient des étudiants. Ainsi nous n'attirons pas seulement un nouveau public, nous encourageons aussi leurs proches et amis à venir au M.

 

Si tous ces exemples seront abordés au cours de la conférence, il va sans dire qu'elle ne concernera pas uniquement le M. Les présentations et ateliers examineront aussi d'autres initiatives inspirantes, belges et étrangères. L'une d'elles est 'Musée comme chez soi', imaginée par le Musée d'Ixelles, fermé pour travaux jusque 2024. Entretemps le musée invite des voisins à choisir une œuvre de la collection pour l'exposer chez eux le temps d'un week-end. Un musée japonais associe à son fonctionnement les Aïnous, le peuple autochtone de l'île d'Hokkaido. Et un musée de Singapour propose aux habitants d'une résidence-services de contribuer de façon créative – et à l'abri du Covid – à une exposition d'art contemporain.

 

De plus en plus de musées font aussi appel à la co‑création au sein même de l'institution, un procédé appelé « edu-curation », mot-valise anglais composé de « education » et « curation ». L'expression inventée par Pat Villeneuve, l'une des deux oratrices principales de cette conférence, désigne la collaboration intensive entre différents départements d'un même musée. Si auparavant les expositions étaient principalement élaborées par les gestionnaires des collections, à présent les collègues d'autres services, par exemple celui de la Communication, y contribuent. Tant le fonctionnement du musée que la participation du public sont ainsi renforcés.

 

Bienvenue au temple

Co-création, participation, « edu-curation », ce sont de grands mots, mais que peuvent apporter ces concepts à la pratique muséale quotidienne ? La conférence tente également de répondre à cette question. La principale valeur ajoutée de la co‑création est une évidence : elle facilite l'accès au musée qui, aux yeux de beaucoup de gens, reste malgré tout un temple dédié à l'art, un endroit où ils n'entrent pas spontanément parce qu'ils pensent que l'offre ne leur est pas destinée. La co‑création peut aider à rectifier cette idée. Au M, nous l'avons clairement constaté, entre autres, au cours de notre collaboration avec l'école fondamentale Mater Dei : après quelque temps, les enfants se mettaient à parler de « notre » musée. Un tel résultat ne s'obtient pas en proposant à une classe une seule visite guidée par an.

 

La co‑création va donc nettement plus loin que la médiation envers le public habituelle, mais ces deux approches ne sont pas incompatibles. Nina Simon, la seconde oratrice principale de la conférence, y a consacré en 2010 un ouvrage qui fait autorité, intitulé The Participatory Museum. Elle y met en avant l'image d'une échelle à multiples barreaux, avec au sommet un projet public à encadrement intensif comme Les Dix au M. Plus bas se situent, par exemple, les initiatives associant le public à des ateliers ou groupes consultatifs. Le dernier barreau est celui de la visite de musée « ordinaire » – après tout, c'est aussi une forme de participation du public. Cette diversité est précieuse, car chaque visiteur ne ressent pas le besoin de faire partie d'un projet participatif intensif.

 

Hybride

La conférence ICOM CECA est de nature hybride ; elle se déroule en partie au musée et en partie en ligne. Les deux premières journées sont numériques, composées de conférences en ligne à traduction simultanée en anglais, français et espagnol, les trois langues officielles de l'ICOM. La participation au volet numérique est gratuite et ouverte à tous ; il suffit de s'inscrire. La troisième journée se déroule au M, la dernière journée est consacrée à des visites de travail à plusieurs musées bruxellois. Le samedi sont proposées des excursions facultatives à Anvers, Gand, Liège ou Mons, des villes où a également été mis au point un programme autour de la co‑création.

 

La journée de conférence au M comprend aussi des « sessions de posters » : au lieu de donner une conférence orale, les auteurs résument sur une affiche les mots clés de leurs propos. Tous les posters sont accrochés dans une même salle, où les participants peuvent les lire et échanger avec les auteurs et entre eux.

 

Pour finir, mentionnons que le M organise cette conférence avec plusieurs partenaires. Outre l'ICOM CECA et l'ICOM Belgique, il s'agit de la KU Leuven, du centre de soutien flamand du patrimoine culturel Faro et de Bamm!, une organisation d'éducation artistique qui propose entre autres des projets participatifs dans les musées. Les partenaires ont contribué à l'élaboration du programme et organisent aussi des ateliers. Ainsi la conférence est elle-même un bel exemple de co‑création.

 

ICOM CECA-conferentie: 25.10 - 30.10.2021.