Découvrez la collection : « DOKA »

Vue de l'exposition « DOKA », 2023, M Leuven

Vue de l'exposition « DOKA », 2023, M Leuven, photo : We Document Art pour M Leuven

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DOKA

Depuis la fin de l’année passée, M expose la présentation de la collection « DOKA», organisée par Geert Goiris, commissaire invité et photographe belge dont une exposition individuelle s’est tenue à M en 2013.

Vue de l'exposition « DOKA », 2023, M Leuven

Vue de l'exposition « DOKA », 2023, M Leuven, photo : We Document Art pour M Leuven

La sélection d’œuvres d’art contemporain de « DOKA» nous invite à porter un regard nouveau sur ce qui nous paraît familier et habituel, et s’articule autour du plaisir et de la nécessité de regarder. Dans les pages qui suivent, Geert Goiris explique de quelle façon il contemple certaines des œuvres exposées.

 

La plupart des œuvres d’art sont conservées dans des dépôts sombres et voient rarement la lumière du jour. Goiris conçoit l’exposition comme un espace où les images s’illuminent dans l’obscurité, comme dans une chambre noire, ce lieu magique où l’on développe les photographies analogiques et où apparaissent les images.

Lili Dujourie

Passion de l’été pour l’hiver, vidéo sans son, noir et blanc, 15 min, 1981, Collection Cera à M Leuven

« Cette vidéo monochrome, tournée à Ostende, constitue le point de départ de cette présentation de la collection. L’image est grisâtre et un peu floue. Il s’agit d’un long plan séquence sans interruption. Nous voyons une projection sobre, dénuée d’artifices. Dujourie ne se laisse pas tenter par des points de vue ou des mouvements de caméra virtuoses. La simplicité trompeuse n’enlève rien à la radicalité de l’œuvre. La position de la caméra vidéo mesurée avec minutie et surtout le maniement de l’appareil qu’en fait Dujourie en tant qu’artiste, modèle (c’est elle la femme que l’on voit à l’image) et spectatrice donnent toute sa force à l’œuvre. »

 

« L’artiste nous montre sa fascination pour l’instant flottant. Son personnage n’évolue pas ou à peine. Le temps passe sans que rien d’essentiel ne change. J’observe avec intérêt la façon dont elle parvient à évoquer une telle élégance et une telle richesse de sentiments rien qu’avec son corps, une chambre et une caméra vidéo fixe. L’apparition de Dujourie n’est pas un spectacle : ce corps n’accomplit rien, il n’est pas soumis à la pression de produire ou de consommer. Il s’agit d’un corps vide, qui s’ennuie peut-être, mais qui demeure authentique et réfractaire, sensuel et par-dessus tout autonome. »

 

« Passion de l’été pour l’hiverdécrit l’aspiration à l’inaccessible. Ce qui est loin de nous nous attire – l’impossibilité n’est jamais un obstacle dans les histoires d’amour. Le corps peut sembler passif, mais le titre suggère un désir passionné. Vue de l’extérieur, cette tempête intérieure reste invisible. »

‘Passion de l’été pour l’hiver’ still, Lili Dujourie, 1981, Cera-collectie bij M Leuven

‘Passion de l’été pour l’hiver’ still, Lili Dujourie, 1981, Cera-collectie bij M Leuven © de kunstenaar & Argos Centre for Audiovisual Arts

Ann Veronica Janssens

Corps Noir, plexiglas, 1994

« Ce “corps noir” est un panneau en plexiglas noir, un bol qui reflète le monde à l’envers. L’objet a la qualité insaisissable d’un métamorphe : la perspective n’est pas fiable, la matérialité est douteuse. Vue de côté, on peut encore estimer la profondeur de la sculpture murale, mais de face, elle semble infinie. On ne sait pas si l’on regarde une lentille concave ou convexe. Cet objet difficile à définir est à la fois brillant et transparent, un miroir noir qui pourrait tout aussi bien être un morceau de verre solide. L’œuvre d’Ann Veronica Janssens est une quête de perception de la lumière et de la légèreté. Ses œuvres sont des explorations fascinantes de l’illimité et de l’immatériel. »

‘Corps Noir’, Ann Veronica Janssens, plexiglas, 1994

‘Corps Noir’, Ann Veronica Janssens, plexiglas, 1994 © de kunstenaar, foto: Galerie Micheline Szwajcer

Paul Casaer

Tropical Archive, fer et laque, 2020, Collection de la Communauté flamande à M Leuven

« L’échelle disproportionnée du porte-journaux et les feuilles stylisées de plantes tropicales paraissent étrangement familières. Comme si le mobilier se transcendait et devenait un monument imposant destiné à d’autres mondes. La domesticité d’après-guerre, dans laquelle les plantes d’intérieur et la presse illustrée incarnaient un mode de vie confortable et les tout premiers pas d’une existence mondialisée, bouscule en douceur le titre et la démesure de l’œuvre d’une étrangeté quelque peu inquiétante. Malgré leur diversité culturelle et leur faune et flore paradisiaques, on attribue des connotations défavorables aux tropiques dans nos régions. Par le biais des magazines, les Tristes tropiques avec leur lot d’histoire coloniale sordide, de malnutrition et de maladies horribles pénètrent nos intérieurs. »

‘Tropical Archive’, Paul Casaer, ijzer en lak, 2020, Collectie Vlaamse Gemeenschap bij M Leuven

‘Tropical Archive’, Paul Casaer, ijzer en lak, 2020, Collectie Vlaamse Gemeenschap bij M Leuven © de kunstenaar

Dirk Braeckman

F.W.-H.P.-21, impression jet d’encre ultrachrome, 2020, Collection de la Communauté flamande à M Leuven

« Cette grande photographie analogique représente un détail de paysage montagneux. Les reflets dans l’image trahissent cependant qu’il s’agit d’une reproduction : une photographie d’une image de paysage. La reproduction d’une montagne est une version de seconde main, une citation. L’accent se déplace du paysage vers la proximité, vers une illustration sur du papier taché, vers la lumière réfléchie du flash. L’image originale est malmenée : les rayures, les détériorations et les reflets sont accentués. »

 

« Plus que le sujet de l’œuvre, c’est la présence du photographe, de son appareil et de la lumière artificielle qui attirent le regard des spectateur·rices. Là où la lumière touche une surface se crée une blessure de contact comme une preuve médico-légale d’une rencontre entre la lumière et la matière. La tache de lumière explicite laissée par le flash ébranle l’idée de la photographie en tant que représentation directe de la réalité.

‘F.W.-H.P.-21.’, Dirk Braeckman, ultrachrome inkjetprint, 2020, Collectie Vlaamse Gemeenschap bij M Leuven

‘F.W.-H.P.-21.’, Dirk Braeckman, ultrachrome inkjetprint, 2020, Collectie Vlaamse Gemeenschap bij M Leuven © de kunstenaar, foto: Zeno-X

Gintautė Skvernytė

Corolla, film 16 mm, 3 min, 2019, Collection Cera à M Leuven

« Gintautė Skvernytė a un jour commencé à travailler avec de la paraffine, un matériau souple qui peut être modifié indéfiniment par pression ou par incision. Cette expérience l’a amenée à travailler sur de la pellicule analogique, un matériau également sensible, susceptible de fixer des images éphémères. Corolla, son premier film en 16 mm, se compose de sept gros plans de pétales de fleurs posés sur des paupières humaines, que le mouvement involontaire des yeux anime comme des ailes de papillons. Le film est projeté en boucle et a des qualités sculpturales : tactilité, dynamisme et matérialité – le support physique du film fait partie de l’expérience de visionnage. On ne voit jamais les visages en entier, il y a peu de reconnaissance ou d’identification. L’essentiel réside dans la manière dont le végétal et l’humain se touchent et dans le lien subtil qui se tisse à la frontière de ces deux mondes.

‘Corolla’, Gintautė Skvernytė, 2019, Cera-collectie bij M Leuven

‘Corolla’, Gintautė Skvernytė, 2019, Cera-collectie bij M Leuven © de kunstenaar, foto: © Elias Derboven voor M Leuven

Vue de l'exposition « DOKA », 2023, M Leuven

Vue de l'exposition « DOKA », 2023, M Leuven, photo : We Document Art pour M Leuven

DOKA

15.12.23 - 05.01.25